Martial Bléger
Théâtre

Les valises 1 / Pièce courte 10

Dans la salle de retrait des bagages d'un aéroport.

ELLE - Ah ! Ma valise ! Pas trop tôt !

Elle se saisit d'une grosse valise rigide, genre Delsey.

LUI - Mais, c'est ma valise !

ELLE - Pardon, Monsieur. Vous êtes sur mon chemin !

LUI - Mais enfin, s'il vous plaît...

ELLE - Que me voulez-vous ? Vous ?

LUI - A vous, rien. C'est juste que vous alliez partir avec ma valise.

ELLE - Vous voulez dire ma valise ?

LUI - Non, c'est bien la mienne. Je la reconnaîtrai entre mille !

ELLE - Vous faites erreur, Monsieur. Excusez-moi, je suis pressée.

LUI - Donnez-moi ça !

ELLE - Lâchez cette valise !

LUI - Pas question ! Vous essayez de me la voler !

ELLE - Quoi ?

LUI - Avec votre air de ne pas y toucher, jolie et bien sapée en plus, ni vue ni connue en somme, vous piquez les valises des gens. Mais ce coup-ci, c'est raté !

ELLE - Si vous ne lâchez pas cette poignée, j'appelle la police !

LUI - Je voudrais bien voir ça ! Allez-y, je ne bougerai pas !

ELLE - Ecoutez, je suis pressée ! Si c'est pour la caméra cachée, ça va, on a bien     ri ! Si c'est juste une façon que vous avez de draguer les filles, je vous précise d'emblée que vous n'êtes pas, mais alors pas du tout, mon genre !

LUI - Une malade ! Je suis tombé sur une malade !

ELLE - Et d'abord, d'où venez-vous ?

LUI - Ben, de Bombay...

ELLE - Je ne vous ai pas vu dans l'avion !

LUI - Il y avait 342 personnes dans cet avion !

ELLE - Je ne vous ai pas vu non plus à l'embarquement !

LUI - C'est vous qui contrôliez les passeports à Johannesburg ?

ELLE - Non, mais je suis très physionomiste !

LUI - Sauf pour les valises apparemment !

ELLE - Comment faut-il que je vous le dise : c'est ma valise !

LUI - On s'énerve bêtement ! Il n'y a qu'à contrôler l'étiquette.

ELLE - C'est vrai !

LUI - Merde ! Il n'y a plus d'étiquette ! Elle a été arrachée !

ELLE - Quand on voit comment ils les balancent les valises, ça n'a rien d'étonnant !

LUI - C'est vous qui l'avez arrachée !

ELLE - Écoutez, ça va bien maintenant. Votre ton est insupportable ! Pas une seconde, vous ne pouvez penser que c'est peut-être vous qui vous trompez, pas un seul instant vous ne vous remettez en question. Vous n'êtes qu'un  macho stupide et borné !

(A suivre...)