MACBETH

 

MACBETH de William Shakespeare

 

avec La Troupe du Théâtre du Soleil

 

 

 

C'est le petit Macbeth qui monte, qui monte...

 

 

Ah, La Cartoucherie ! Le théâtre du Soleil ! Rien que d'accéder à ce lieu mythique du théâtre est en soi une récompense (surtout quand la navette ad hoc est engluée dans l'embouteillage du Parc Floral et que vous faites 2 kms à pied depuis le métro) !

Plus sérieusement, l'endroit vous saisit toujours avec la même force ! C'est le Saint des Saints ! L'Ultima Thulé de la Chose théâtrale ! 50 ans qu'Ariane Mnouchkine règne ici avec la grandeur et la simplicité de ceux qui n'ont plus rien à prouver !

Franchi le gigantesque hall d'accueil et de restauration entièrement décoré aux couleurs de William et de Macbeth, puis un second espace où l'on peut observer les comédiens se maquiller (un rituel, ici), vous vous installez enfin au mitan de la Sainte Chapelle du Théâtre ! Et c'est parti pour 4 heures de courses-poursuites élisabéthaines (avec entracte, mais quand même !)

On ne présente plus la tragédie de Macbeth. Enfin, en deux mots, on dira que c'est l'histoire d'un type qui se voit promu à la suite d'une grosse baston, et auquel de mauvaises langues prédisent bientôt le poste du patron. Bien qu'il y croit dur comme fer, il est toutefois d'un naturel plan-plan qui ne l'incite guère à l'action. Malheureusement, à la maison, c'est sa femme qui porte la culotte....

Attention, question scénographie, c'est unique ! D'autant que le plateau est grand comme un court de tennis et que les décors arrivent et repartent à toute vapeur ! Au moment du salut, vous comprendrez pourquoi. Réellement, c'est très beau, très pro aussi : on ne peut voir cela qu'ici à pareille échelle ! Sons, bruitages, lumières : idem. Tout est parfait. Costumes itou ! Une prouesse !

Mais une pièce ne se résume pas à cela : trop de mouvements plateau finissent par nuire à la bonne lecture de l'histoire. On se disperse, là où l'action se resserre. Si certaines scènes supportent le monumental, d'autres ont besoin d'intimité. La scène majeur dans laquelle Lady Macbeth insuffle à son homme, redevenu pusillanime, le courage homicide - est comme désamorcée par le décor grandiose de la roseraie.

Et nous en arrivons là à la fêlure majeure de ce spectacle : l'interprétation de Lady Macbeth (Nirupama Nityanandan). Car rater Lady Macbeth dans Macbeth, c'est comme rater le rôle du méchant dans un James Bond : un truc dont on ne se relève pas ! Déjà limite audible sur le plan vocal, souvent mal dirigée, elle n'exprime dans son jeu ni la puissance ni la sensualité trouble du personnage. (Il faut dire que le choix de ses tenues ne l'aide pas vraiment.)

Quand à Macbeth (Serge Nicolaï), s'il semble un peu plat durant la première partie, il est vraiment bon dans la seconde, avec un jeu qui fait bien ressortir le côté un peu tragicomique du personnage.

Le problème est qu'entre les deux comédiens, le courant ne passe pas : la folie du couple uni dans le crime, on la cherchera en vain !

Parmi les autres, tous parfaits, on distingue un Malcom (Duccio Bellugi-Vannuccini), très subtil.

Heureusement, le piège d'une mise en scène voyante et considérable semble avoir été néanmoins perçue, car Mnouchkine nous livre un final resserré à l'extrême, quasiment sur une tête (certes couronnée), très convaincant ! A noter également la scène du banquet où apparaît le spectre de Banquo : magnifique ! De même que l'idée de la transposition à une époque contemporaine fonctionne bien : bonne scène notamment où Macbeth découvre la seconde partie des prophéties des sorcières !

Sinon, la traduction (de Mnouckine) évite soigneusement les phrases que le public attend, c'est malin, mais c'est quand même moins fort que dans La traduction d'Yves Bonnefoy. Exemples : « Trompeur doit être le visage quand l'est le coeur » devient « un visage trompeur doit masquer un coeur trompeur » ou « Nous sommes encore jeunes dans le crime » devient « nous sommes encore jeunes dans l'action » !

En bref, il y a du très très bon et parfois de l'incompréhensible, mais il semblerait que Mnouchkine ait voulue monter un opéra, et il faut le comprendre comme cela. De toute façon, il faut y aller ! Car c'est comme aller voir la mer un jour de « grandes marées » : on en prend plein les yeux !

 

Avec qui ? Votre mec au chômage depuis 6 mois, qui vous reproche votre sale caractère quand vous ne supportez pas de le voir déambuler en peignoir à six heures de l'après midi au milieu du salon. Il verra qu'en matière de femme, il y a pire.

 

Jusqu'au 1 Mars à la Cartoucherie

 

MB