VOYAGES AVEC MA TANTE

 

VOYAGES AVEC MA TANTE de Graham Greene / Version scénique de Giles Havergal

 

Avec Claude Aufaure, Jean-Paul Bordes, Dominique Daguier, Pierre-Alain Leleu



To be or not to be alive.

 

La photo de départ est très simple : Henry Pulling - sorte de Bartleby à la sauce anglaise - est un vieux garçon qui a fait toute sa carrière dans la banque, et dont la seule activité se résume à regarder pousser ses dahlias. Aux obsèques de sa mère, celui-ci tombe sur tante Augusta, le mouton noir de la famille. Excentrique et volage, après lui avoir annoncé que la défunte était morte vierge, elle entraine le pauvre Henry dans un tourbillon d'aventures.

Multiples rebondissements qui les emmèneront jusqu'à Istanbul, puis second départ vers le Paraguay, terre de trafics et d'asile pour les criminels de guerre : c'est bien à travers les yeux de sa tante (sa mère ?) que Henry découvre – enfin – le monde.

« Voyages avec ma tante » est un avatar déjanté d' "Alice au pays des merveilles" avec Henry dans le rôle d'Alice et tante Augusta dans celui du lapin blanc toujours pressé. Car il y a ici urgence à vivre au mépris des lois, des conventions et de l'argent, et tans pis si le fantasme prend la place de la raison, la réalité est si déprimante !

Le coup de maître de l'adaptation scénique est d'avoir limité à quatre comédiens l'ensemble des rôles du roman, en l'occurrence ici quatre hommes pour interpréter plus de 20 personnages aussi bien féminins, masculins que du genre animal.

La mise en scène de Nicolas Briançon est une leçon d'économie de moyens au profit d'un résultat magique. C'est précis, enlevé et toujours so British ! Grande qualité également chez les comédiens qu'on croirait sorti d'un film de Lubitsch : Claude Aufaure qui campe la vieille dame indigne avec gourmandise, mais aussi Jean-Paul Bordes, comédien protéiforme fabuleux dans le rôle de la cousine pleurnicharde, Pierre-Alain Leleu exceptionnel en perroquet géant, et Dominique Daguier qui campe entre autres un Woodsworth (l'amant noir de tante Augusta) à tomber !

Difficile de trouver un point faible à ce spectacle où la littérature se marie avec les planches pour former un moment de plaisir intense.

 

N'y allez pas avec un surfeur, votre oncle de Boulogne sourd comme un pot, ou une fille un peu bêtasse afin de ne pas gâcher un moment rare de théâtre.

 

Jusqu'au 27 Juin à La Pépinière

 

MB